- ASSAD (H. AL-)
- ASSAD (H. AL-)ASSAD HAFEZ AL- (1930- )Le président de la République arabe syrienne est né à Qardaha, bourgade montagnarde du mohafaza (district) de Lattaquié, en Syrie, dans une famille de cultivateurs aisés membre de la tribu alaouite de Kalbié. Le jeune Hafez al-Assad, après des études primaires dans son village natal, entre au lycée de Lattaquié. Dès cette époque, il s’intéresse à l’action politique; à seize ans, il est déjà membre du parti Baath arabe socialiste et participe aux manifestations contre l’occupant français puis contre les acteurs politiques traditionnels qui président aux destinées de son pays nouvellement indépendant. Le comité des étudiants du district de Lattaquié, dont il est membre, le porte à sa direction et, en 1951, il devient président de la Fédération nationale des étudiants syriens, qui lutte alors en faveur de la cause palestinienne et de l’unité de la patrie arabe.Hafez al-Assad choisit la carrière des armes, qui est, avec l’enseignement, la filière de promotion sociale idéale pour les ruraux. À l’Académie militaire de Homs, où il a été admis en 1952, il reçoit une formation d’officier de l’armée de l’air et en sort, au début de 1955, sous-lieutenant breveté de pilotage de chasse. Il effectue alors ses premiers stages de spécialisation, dont une session de pilotage nocturne en Union soviétique. Durant la période de l’union avec l’Égypte (févr. 1958-sept. 1961), il commande au Caire une escadrille de chasse nocturne. C’est là qu’il se lie avec des officiers progressistes, éloignés comme lui de Syrie, et qu’il constitue avec eux le «comité militaire» baathiste, pépinière des futurs responsables du pays. En raison de son hostilité au coup d’État sécessionniste, il est écarté de l’armée le 2 décembre 1961 pour «menées antipatriotiques» et rappelé à Damas, où on lui confie un emploi au ministère des Transports maritimes. Il participe alors activement à la lutte pour le renversement du régime et devient l’un des principaux dirigeants du groupe baathiste qui s’empare du pouvoir le 8 mars 1963.Réintégré dans l’armée, diplômé de l’état-major de l’aviation en 1964, promu général de brigade le 2 décembre de la même année, il se voit confier le commandement d’une brigade aérienne, puis d’une base et, le 8 mars 1965, le commandement en chef de l’armée de l’air et de la défense aérienne. Parallèlement, il occupe plusieurs postes d’importance au sein des deux directions, nationale (arabe) et régionale (syrienne), du parti Baath. À ce titre, il participe avec le général Salah Jedid, alaouite comme lui, au mouvement du 23 février 1966, qui élimine les modérés du général Amin al-Hafez et du théoricien Salah Bitar, de la direction du pays. Il reçoit, le 1er mars, le portefeuille de la Défense nationale, qu’il conserve successivement dans les ministères Zou’ayen et Atassi. En septembre 1966, son intervention à Soueida sauve in extremis les dirigeants syriens menacés par le putsch du commandant druze Hatoum. Dès cette époque, pourtant, il prend ses distances par rapport à l’équipe néo-baathiste (Jedid, Zou’ayen, Atassi) dont l’intransigeance doctrinale et l’autoritarisme ruinent la Syrie. Il asseoit progressivement son influence au sein de l’armée, nommant des hommes de confiance aux postes clés, reléguant à des fonctions administratives ceux qui lui résistent. Lors de la défaite de juin 1967, qu’il impute aux choix «révolutionnaires» de Salah Jedid, il sauve «son» aviation de la destruction en évitant au maximum de l’engager dans la bataille. En septembre 1970, de concert avec le numéro deux irakien, le général Takriti, il s’oppose à l’intervention des troupes syriennes aux côtés des fedayin qui affrontaient l’armée hachémite au nord de la Jordanie.Sa conquête méthodique du pouvoir se heurte à la majorité des commandements du parti Baath; ayant obtenu un demi-succès au IVe congrès régional extraordinaire (20-31 mars 1969), il est mis en minorité au terme d’une âpre lutte d’influence, au Xe congrès national extraordinaire (30 oct.-12 nov. 1970). Fort de l’appui de la majorité de l’armée, assuré du consensus populaire, aidé par les «brigades de défense», la milice alaouite de son frère Rifa’at créée en 1968, il s’empare du pouvoir le 13 novembre 1970, fait emprisonner ses adversaires et épure l’appareil du parti en constituant un commandement provisoire régional. Le 21, il fait entériner sa nomination comme chef d’un gouvernement d’union nationale, se réservant le portefeuille de la Défense. Porté à la magistrature suprême de l’État par un plébiscite le 12 mars 1971 (99,2 p. 100 des votes exprimés), au secrétariat régional du parti Baath le 14 mai 1971 (Ve congrès régional), au secrétariat général à la fin d’août (XIe congrès national), réélu en 1978, 1985 et 1991, il oriente le pays dans le sens de l’ouverture politique et de la libéralisation économique.Sous des dehors réservés et secrets, trait distinctif de la communauté montagnarde alaouite opprimée depuis des siècles par la majorité sunnite orthodoxe de l’islam, Hafez al-Assad est un chef d’État réaliste, possédant le sens de la mesure et de l’opportunité. Ces qualités en font un redoutable négociateur, apprécié de Henry Kissinger qui prépare avec lui durant six mois (déc. 1973-mai 1974) l’accord de désengagement syro-israélien qui suit la guerre d’Octobre. Le recours à la ruse, les retournements imprévisibles, la réflexion prolongée, l’écoute attentive lui permettent de traverser avec succès les plus délicats moments de l’occupation du Liban (1976), de la rupture avec l’Égypte (1977) et des négociations pour l’unité avec l’Irak (1979). Le personnage, un peu lourd au premier abord, gagne en aisance et en autorité sur la scène internationale.L’opinion syrienne, divisée à l’égard des baathistes, estime son réalisme et son efficacité éloignée du dogmatisme de ses prédécesseurs. C’est ainsi qu’il engage son parti dans un Front national progressiste (1972) avec quatre autres formations politiques et multiplie les consultations électorales (une par an de 1970 à 1978), tandis qu’à l’extérieur il réconcilie son pays avec l’Arabie Saoudite, qui finance la moitié du budget d’un État en pleine croissance.L’opinion publique syrienne le crédite d’une réelle humanité et d’une probité qui le mettent à l’abri des critiques et de l’enquête sur la corruption (1977) qui vise les hauts responsables civils et militaires de son «mouvement rectificatif». La simplicité affichée de ce père de cinq enfants, aux goûts modestes, contraste en effet avec le luxe insolent des prébendiers du régime, dont certains sont ses collaborateurs et amis de toujours, ou même ses proches parents: Abou Sleimane a quatre frères, dont Ali, le député, et Rif’at, à la fois commandant des «brigades de défense» et premier homme d’affaires du pays; une belle-mère député; un cousin, Adnan, lui aussi chef de milices; un beau-frère qui présidait les Amitiés syro-soviétiques jusqu’à son assassinat, en mars 1978.Sur le plan intérieur, Hafez al-Assad n’hésite pas à pratiquer une répression violente (massacre des Frères musulmans à Hama en 1982) et, sur le plan international, il est souvent soupçonné de donner asile à des groupes terroristes, exposant son pays aux sanctions des pays occidentaux. Au cours de la guerre Iran-Irak (1980-1988), son soutien à l’Iran accentue l’isolement de son pays. Mais lors de la crise du Golfe, qui a suivi l’invasion du Koweït par l’Irak en août 1990, Hafez al-Assad choisit de se ranger aux côtés de la coalition anti-irakienne chargée de libérer le Koweït. Cette attitude assure son retour sur la scène internationale, confirmé par son acceptation, le 14 juillet 1991, d’une Conférence de paix sur le Proche-Orient patronnée par Washington et fondée sur le principe — non reconnu par Israël — de l’échange des territoires occupés contre la paix.
Encyclopédie Universelle. 2012.